LES PLUS LUS
Publicité

Le dimanche de Robert Charlebois : « Je lève le pied »

Le chanteur québécois, en concert ce week-end prochain à Paris, adore flâner à Montréal ou dans son repaire hivernal en Guadeloupe

Eric Mandel
Robert Charlebois mi-mars dans son pied-à-terre parisien.
Robert Charlebois mi-mars dans son pied-à-terre parisien. © Éric Dessons/JDD

Il appelle depuis la ­Guadeloupe, son paradis sur terre, où il se la coule douce depuis bientôt trois mois. « Ah voilà mes poules, vous les entendez chanter ? J’ai aussi un iguane et un chat qui rôde », s’amuse Robert Charlebois. Avec un peu d’imagination, on visualise sans peine le panorama qui s’offre au chanteur depuis sa maison en bois construite au début des années 1980 avec l’aide de son pote Coluche, « un bricoleur de génie ». Située dans le nord de Basse-Terre, au cœur d’une végétation luxuriante avec vue sur la mer, elle est sa destination favorite pour fuir l’hiver québécois. « En quatre heures d’avion, je passe de - 30 à + 30 degrés. Je ne connais pas de plus grand plaisir au monde : ici, c’est un peu tous les jours dimanche. »

Publicité

Dans son repaire caribéen, le septième jour possède pourtant ses rituels sacrés : « Le matin, je descends à la plage pour acheter des boudins, les meilleurs de ­Guadeloupe. Le gars est un génie, il en fait aux épinards, à la morue. J’y vais quand tout le monde est à la messe, sinon l’attente est interminable ! »

La suite après cette publicité

Farniente en Guadeloupe avant la scène

Évitant les restaurants bondés le dimanche, ce solitaire bien entouré préfère organiser des barbecues et partir en balade « dans des endroits secrets pour fuir les touristes ». Le jour de notre entretien, le chanteur savourait ses dernières heures de farniente non sans une pointe de regret, mais avec une fringale de jeune homme à l’idée de reprendre du service.

La suite après cette publicité

 Je me suis préparé comme Frank Sinatra. Deux semaines avant de partir en tournée, il arrêtait le whisky et faisait des longueurs à la piscine 

Robert Charlebois

En grande forme à 78 ans, il débarque cette semaine en Europe avec un concert-spectacle, Robert en CharleboisScope, pour célébrer cinquante ans de carrière. Jeudi, il était d’abord à Liège (­Belgique) avant d’enchaîner deux dates au Grand Rex de Paris ce week-end. « Je me suis préparé comme Frank Sinatra, précise-t‑il. Deux semaines avant de partir en tournée, il arrêtait le whisky et faisait des longueurs à la piscine. Moi, j’ai nagé dans la mer et j’ai un peu freiné sur le rhum. C’était nécessaire, car le show est très “demandant”. Il est assez rock, peut-être un peu trop pour le public français. » Hasard du calendrier, le dernier concert, le 2 avril, tombe un dimanche… : « Pour moi, c’est un jour comme un autre. Quand les lumières s’allument, j’oublie tout. »

Pétanque et golf

Quand il n’est pas sur scène, Robert Charlebois savoure ses dimanches en toute simplicité. À Montréal, ses matinées débutent devant La Grande Librairie sur TV5Monde. Dans son lit, en prenant son petit déjeuner, « des eggs and bacon, la seule chose que les Anglais nous ont donnée de bon dans la bouffe ». L’après-midi est consacré « aux amis normaux qui travaillent la semaine ».

La suite après cette publicité
La suite après cette publicité

Au programme : pétanque, pique-nique et, si le temps le permet, une virée sur son golf privé : « Faire un 18-trous à pied, c’est fantastique pour le cardio, assure l’artiste. C’est la base de mon métier. Même pour composer, il faut être en forme. » En revanche, il délaisse un peu sa muse : « En semaine, je joue trois heures quotidiennement sur ma guitare et mon piano. Le septième jour, je lève un peu le pied, mais je reste à l’affût d’une mélodie. »

Son classique Ordinaire (1971) a été ainsi composé un dimanche. « La veille, je jouais dans une pièce psychédélique, La Fin tragique de Suparchipelargo. Un flop monumental, même les fumeurs de joints n’y comprenaient rien… J’étais blessé, je me posais mille questions sur ma carrière et le rôle d’un artiste. Le lendemain matin, je vois sur mon piano un texte écrit dans la nuit par mon épouse, Mouffe. J’ai trouvé la mélodie dans la journée ! »

Émois en soutane

Sans se faire prier, il rembobine le fil de son histoire pour raconter ses années de pensionnat, à Rigaud, près de Montréal. « À l’époque, j’étais déjà un loup solitaire, je détestais l’instinct grégaire. Heureusement, j’avais trouvé une salle avec un piano où je pouvais m’isoler pour jazzer, jouer du Chopin et du Beethoven en boogie-woogie. »

Dans ce lieu clos, le dimanche était son jour favori. « Parce que mes parents me rendaient visite, raconte-t‑il. On allait à la baraque à frites manger des hamburgers avec les doigts, tout ce qui m’était interdit au pensionnat. Parfois, ils venaient avec des copains qui me parlaient du dernier 45-tours d’Elvis. C’était mon seul contact avec la vraie vie. »

S’il aimait autant le jour du Seigneur, c’est aussi pour d’autres raisons, qu’il raconte dans un grand éclat de rire : « Je me levais à 6 heures du matin pour servir la messe. Je portais la patène du curé devant 250 collégiennes qui s’agenouillaient et tiraient la langue devant moi. De belles émotions, mes premiers émois. Heureusement que je portais une soutane… »

À l’automne d’une vie bien remplie, le musicien affiche une « nostalgie souriante, mais aucune mélancolie ». Des anecdotes, il pourrait en raconter à la pelle, notamment ce dimanche passé chez Barbara, à Précy-sur-Marne. Elle avait été bouleversée par sa chanson Le Piano noir (1973). « Elle voulait l’interpréter, mais elle ne savait pas lire la musique. Elle m’a donc demandé de la jouer sur son piano. Son éclairagiste, Jacques Rouveyrollis, était là avec son projecteur pour suivre mes doigts courant sur le piano, sous son regard. Barbara m’a invité à revenir la semaine suivante, en me disant : “Je saurai la jouer comme toi.” Et ce fut le cas. Un dimanche enchanteur… »

Contenus sponsorisés

Sur le même sujet
Publicité